Page:Moret - L’emploi des mathématiques en économie politique.djvu/85

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jouit du monopole, il est passé à celui où deux individus se partagent ce monopole, pour en arriver finalement à la libre concurrence considérée comme le cas limite où le nombre des monopoleurs devient infini, si toutefois il est permis de s’exprimer ainsi. Mais, tandis qu’il avait fait une ce analyse magistrale » (F.-Y. Edgeworth) du premier cas, A. Cournot a commis dans la généralisation de sa théorie de graves erreurs qui ont donné naissance, dans des conditions que nous rappellerons plus loin, à toute une série de discussions auxquelles M.-V. Pareto[1] paraît avoir mis fin en montrant que si la solution du problème de la détermination du prix d’une marchandise dont la production serait entre les mains de deux monopoleurs est indéterminée (comme l’a indiqué M. F.-Y. Edgeworth[2]), ce problème ne peut en réalité se poser par suite de l’incompatibilité des équations traduisant pour chacun des producteurs le fait que ce producteur est un monopoleur. Enfin, après avoir étudié la détermination du prix de chaque marchandise, A. Cournot a essayé de réaliser la synthèse du système économique à partir des éléments qu’il en avait dissociés — ce qui constituait évidemment une utopie[3], car il était clair qu’il ne pouvait retrouver les éléments qu’il avait précédemment négligés — en faisant parfois, pour l’harmonie de ses démonstrations, trop bon marché des circonstances accessoires. De minimis non curat prætor ! Ajoutons que l’interprétation géométrique de l’équation à laquelle il est parvenu analytiquement a conduit A. Cournot à

  1. Encyclopédie… [p. 149], § 14 n. 22, p. 606 et Manuel… [p. 143], §§ 73 et s., p. 600. Voir infra, III, V, 4.
  2. Mathematical psychics [p. 119], App. V, p. 116.
  3. Cf. V. Pareto, Di un errore del Cournot nel trattare l’economia politica colla matematica dans le Giornale degli economisti, numéro de janvier 1892.