Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/244

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de la Beauté, et la Beauté, c’est la religion de l’esprit. Je ne crois pas me tromper si je dis que, dans l’âme de ce Poëte, il n’y a de place que pour le Rêve de la Beauté. Et cette âme, dans ce Rêve, comme elle y prend son bonheur, y trouve sa croyance. Dieu ne doit-il pas être ce qu’il y a de plus beau ? La Vérité peut-elle n’être pas très belle ? — Sans doute ici retournons-nous aux idées générales. Mais c’est à peine s’il s’agit d’idées. Le livre de Jade est tout de belle grâce, Iskender est tout de belles formes. — Qu’est-ce qui fait donc que Madame Judith Gautier nous semble un poëte plus complet, plus un que, par exemple, son père, Théophile Gautier ? C’est qu’elle a, dans son rêve, plus de liberté, plus d’intensité, plus de simplicité ; c’est, consciemment ou non, qu’elle nous montre dans les belles formes où elle se plaît des symboles de tout ce que nous souhaitons de plus charmant et de plus loyal. — Je ne sais si elle manque dépensées : elle n’a pas risqué de nous le laisser surprendre.

De ce que je disais, à propos de M. Villiers de l’Isle-Adam, je retiens beaucoup pour parler de M. Paul Verlaine, avec cette fondamentale différence que le langage du premier est la Prose, et le langage du second, le Vers. Mais « en nul poëte plus sûrement qu’en celui-ci ne confluent les deux grands courants qui de Gœthe et de Chateaubriand à nous emportent dans leur flot l’art mo-