Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/276

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la rassure en même temps, s’insinue plus avant en elle, en déployant sa science inépuisable et sa non moins inépuisable sincérité, et brusquement, par un tour, si j’ose dire, de gobelet et de génie, nous r’entraîne à sa suite, dans la seconde voie plus obscure, plus difficile que l’autre, mais qu’il aplanit, mais qu’il illumine et nous fuit aimer, — pour nous y arrêter, comme naguère, dans un doute suprême où il semble triompher. Pourtant il se dit et nous voulons bien l’estimer un croyant.

Un croyant aussi, M. Anatole France, au dire de ses vers ; mais sa prose est sceptique. Voilà les contradictions du Dilettantisme Et le cas ici est des plus curieux. Les sujets qui tentent M. France poète, — Les Noces Corinthiennes, par exemple, et cette Leuconoë, si belle, par endroits, qu’on ne peut la comparer qu’à elle-même, — sont mystiques et il les traite avec une mysticité merveilleusement sincère, — croiriez-vous. Mais qu’il vienne à parler en prose de Saint-Antoine, par exemple, il ne nous laissera voir, en ce presque divin rêveur, en ce génie du Christianisme naissant et qui fonda tant d’ordres monastiques et les dota d’une Règle dont nous admirons encore la sagesse et la vigilance, — qu’un cas pathologique, et pour lui le Mysticisme n’est plus qu’une maladie nerveuse. — Alors quoi ? C’était donc un jeu d’enfant, le beau poëme ? Évidemment M. France ne se donne pas à son œuvre et l’Art n’est guère