Page:Morissette - Au coin du feu - Nouvelles, récits et légendes, 1883.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 17 —

onze heures, je partais de chez moi pour aller au marché, en ville, lorsque arrivé près du cimetière de notre paroisse, il me sembla entendre quelqu’un qui se plaignait comme s’il endurait des souffrances inouïes.

J’étais assez brave, mais j’avoue que ces gémissements me donnèrent le frisson.

Seul, sur la route à l’heure où tout le monde sommeille, il faut peu de chose pour effrayer un jeune homme de vingt ans.

Je fouettai mon cheval afin de m’éloigner de ce lieu le plus tôt possible. Il me semblait que les gémissements augmentaient ; je crus même entendre mon nom au milieu de ces plaintes. Vous comprenez dans quelles trances j’étais.

Enfin, après un temps qui me parut affreusement long, j’arrivai à Québec, vers trois heures du matin.

Pendant toute la journée, je pensai à ce qui m’était arrivé, sans cependant en faire part à celles de mes connaissances qui se trouvaient en ville.

J’avais l’espérance de vendre mes produits assez vite pour pouvoir laisser Québec de bonne heure dans l’après-midi. Mais les choses allaient mal, je n’avais pas ma façon d’habitude. Plusieurs de mes pratiques trouvèrent que j’avais un air curieux et me demandèrent même si j’étais malade.