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je le disais plus haut, il n’avait jamais osé ouvrir son cœur à la fille de son patron.

Pourquoi agissait-il ainsi ?

C’est que Lucien avait sa fierté à lui, fierté bien pardonnable, mais qui n’avait pas sa raison d’être.

Lucien était pauvre et se figurait que c’était un crime, dans la position où il se trouvait, d’oser lever les yeux sur la fille de son patron.

Vous ai-je dit que Marie-Louise était belle ?

Non ; eh ! bien, je m’empresse de réparer mon oubli.

Marie-Louise était une jolie blondette de vingt ans. Taille élancée, yeux bleus, teint d’une blancheur de neige. Lucien et Marie-Louise faisaient le plus beau couple que l’on put rencontrer dans tout le comté de Champlain.

Il fallait les voir, le dimanche, l’un à côté de l’autre, se rendre à l’église, entendre la messe dans le même banc, entre monsieur et madame Marcotte et revenir à la maison.

On se rangeait sur leur passage et on les admirait.

Il n’y avait rien qui séparait ces deux jeunes cœurs ; beautés égales, caractères joyeux, tous deux ils étaient faits pour vivre ensemble.

Mais il y avait toujours cette question d’argent.

Marie-Louise était riche.

Lucien était pauvre.