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LE DOCTEUR-NOIR

C’était Jean-Baptiste Flack.

Il parcourait le Palais de Justice, écoutant les conversations, et s’initiant aux mystères des couloirs et des allées de cet immense bâtiment.

Il avait certainement une idée fixe et il travaillait à sa réalisation.

Son mutisme était absolu. Ni Madeleine ni Georges ne savaient ce qui se passait dans son cerveau.

Disons en passant que le fils du président était installé dans la maison du Docteur-Noir et qu’il n’en sortait pas.

Sa santé se rétablissait et il reprenait les vives couleurs de la jeunesse.

Georges, malgré qu’il eût atteint l’âge de l’adolescence, était un véritable enfant. Sa taille mince, son visage imberbe et sa voix timide lui donnaient l’air d’une fille plutôt que d’un jeune homme.

C’était une nature délicate et sensitive à l’excès. Il vivait par le cœur, et son existence s’écoulait dans un immense besoin d’amour.

La mort de sa mère l’avait plongé dans un désespoir sans bornes ; mais à présent il pouvait pleurer celle qui lui avait donné le jour sans être forcé de cacher, ses larmes.

Sa douleur trouvait un écho

Madeleine, l’ancienne femme de chambre, ou plutôt l’amie de Mme Bartier, mêlait ses regrets aux siens.

La petite maison de Noisy eut abrité le calme le plus parfait, si le Docteur-Noir n’eût pas été emprisonné, sous le coup d’une prévention terrible.

Jean-Baptiste Flack partait de bonne heure pour Paris et ne revenait que le soir.

Il savait que Georges et Madeleine n’avaient rien à craindre.

La propriété de Noisy était à son nom. Par bonheur, son maître, ne voulant pas être dérangé à la campagne, n’avait point voulu acheter la maison lui-même.

C’était son domestique qui avait fait l’acquisition en se donnant comme rentier.

De la sorte, le Docteur-Noir pouvait se reposer de ses fatigues sans être requis à tout moment d’aller donner des soins aux malades du pays.

Sa renommée était grande et si l’on avait su à Noisy que le célèbre médecin habitait la contrée, c’eut été une révolution.

Jean-Baptiste Flack était donc, nominativement au moins, le propriétaire de la maison.

Il avait emporté de l’appartement de Paris tous les objets auxquels le Docteur tenait particulièrement et il les avait transporté à Noisy.

Voilà où en étaient les choses à l’instant où s’ouvre ce chapitre.

Flack, suivant sa coutume, était parti par le premier train.