Page:Morphy - Le vampire, 1886.djvu/392

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
392
LE DOCTEUR NOIR

Il se souvint, comme dans un cauchemar, de ce qui s’était passé.

Le couperet de la guillotine déjà fixé au-dessus de sa tête, ne tarderait pas à tomber.

C’eut été folie de compter sur autre chose que la mort.

Le Docteur-Noir, pendant sa longue prévention, s’était familiarisé avec cette idée.

Un instant il avait eu peur.

Si les jurés lui accordaient le bénéfice de circonstances atténuantes ? S’il était gracié ?

Il voulut bien mourir, mais aller au bagne, jamais !

— À présent, au moins, se dit-il, je suis sûr de mon affaire, et je serai condamné pour quelque chose.

En ce moment, il se rappela que Jean-Baptiste Flack lui avait remis un papier.

Il le chercha dans son lit et le retrouva après avoir fureté sous sa tête.

— Comment lire cela ? se demanda-t-il.

Il s’agissait d’être prudent.

Cette fois, l’occasion semblait propice.

Les deux détenus dormaient profondément.

Le gaz était allumé et la clarté assez vive permettait de voir suffisamment pour la lecture.

Un gardien de nuit passa et colla son visage au guichet pratiqué, dans la porte.

Le Docteur-Noir fit semblant de dormir.

Il avait entendu le léger bruit des espadrilles du surveillant sur le bitume de la galerie.

— Tout va bien, pensa-t-il. On ne repassera pas avant quelques minutes. Profitons-en.

Et il déplia le papier sous ses couvertures.

Cela fait il le plaça soigneusement sur son lit et il pencha la tête.

Le surveillant le plus attentif n’eut jamais cru qu’il lisait.

Lucien Bartier semblait dormir.

Voici ce que contenait le document remis par Jean-Baptiste Flack :

« Je commence par vous dire que je ne sais, en écrivant ces quelques lignes, comment je pourrai vous les faire parvenir. Peut-être tomberont-elles en des mains étrangères. Je parle donc à demi-mot, entendez double.

« Je n’ai pas besoin de vous dire la douleur cruelle que j’ai éprouvée, en vous sachant victime de votre humanité.

« Hélas ! votre justification qui devrait être si aisée, me semble bien compromise. J’aime mieux vous dire la vérité.