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TROISIÈME PARTIE




Pierre et Dominique étaient arrivés en haut de la côte de Sexey-aux-Forges.

Chaque année, ils s’arrêtaient à cette place, pris d’une sorte de contemplation, à la vue du paysage qui s’ouvrait à leurs pieds.

Leurs hottes, où s’entassait leur attirail de pêche, étaient posées contre un mur croulant de pierres sèches.

La vallée, qui pendant des lieues n’était qu’un étroit couloir de roches, sinueux et profond, s’élargissait subitement et tandis que la fuite des coteaux ondulait vers l’horizon avec une grâce infinie, les grands bois couronnant leurs cimes n’étaient plus qu’un liséré bleuâtre au bord des cultures, manteau mouvant jeté sur les flancs de la terre.

Au fond du val, des champs de blé, des carrés de betteraves, des pâturages d’herbe drue avaient poussé avec cette opulence lourde des végétations nourries par l’humus noir des terrains d’alluvion. Au sortir de la pauvre vallée rocailleuse, c’était comme un pays de Chanaan étalé à leurs pieds, un pays de richesse et de bien vivre.