Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/58

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par s’entendre. Le bal était commencé, il la prit par la taille, et la soulevant, l’emporta le long des allées, dont le gravier volait sous ses pas.

La brume d’inquiétude se fondit, se dissipa bientôt sous la chaleur de cette gaieté, sous le rayonnement de cette bonne humeur.

Une semaine passa. Pierre avait tout oublié.

Il était pris par une liaison nouvelle, un caprice fougueux et sensuel qui l’attachait à la femme d’un vigneron, une gaillarde qui s’était jetée à sa tête, lui faisant de telles avances qu’il avait dû céder, sous peine de paraître niais. Ils se donnaient des rendez-vous tous les soirs, abritant leurs amours au hasard des logis abandonnés, se retrouvant dans les écuries éloignées des maisons, dans les chambres à four où flottait une odeur de pain chaud. Ils s’aimaient dans les greniers bourrés de foin sec et craquant, et la femme le serrait dans ses bras à le briser, prise d’un coup de passion pareil à une folie, que fouettaient les dangers d’une surprise, les bruits inquiets, les rumeurs de toute nature vibrant dans ces nuits de gelée, d’une sonorité de cristal. Ils s’arrangeaient si bien que rien ne transpirait de leur aventure. Et dans les intervalles de leurs enlacements, la femme se moquait de son mari, un petit homme malingre, qui n’avait guère de vaillance pour aucune besogne. On lui plantait joyeusement des cornes ! Et la canaillerie de cette liaison, cette dépravation enjouée et facile séduisaient Pierre, flattant un fonds de veulerie qui se trouvait en lui.