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elle est comparable pour sa beauté au détroit de la Sonde près des côtes de Java. Il y a deux ans, le roi étant venu visiter Chantaboun, on lui bâtit sur la plage, à l’extrémité du cap, une maison et un kiosque. En mémoire de sa visite, l’on a aussi érigé au sommet de la montagne une petite tour d’où l’on jouit d’une vue très-étendue.

Je visitai aussi Ko-Kram qui est la plus belle et la plus grande de toutes les îles qui se trouvent au nord du golfe entre Bangkok et Chantaboun. Toute l’île n’est qu’une suite de montagnes boisées, mais cependant d’un accès assez facile et renfermant beaucoup de fer oligiste. Les singes et les daims qui l’habitent viennent tous les soirs boire au rivage, car elle manque d’eau douce.

Le 29 au matin, à mesure que le soleil s’élevait à l’horizon, la brise diminuait, et nous n’étions plus qu’à trois milles du détroit qui sépare l’île de l’Arec de celle des Cerfs, lorsqu’elle tomba tout à fait. Depuis une demi-heure, nous n’avancions qu’à force de rames, et exposés à toute l’ardeur d’un soleil brûlant, quoiqu’à une heure matinale, sans le moindre souffle dans l’air, devenu lourd et suffoquant. Tout à coup et à mon grand étonnement, la mer s’agita, se souleva, et ballotta en tous sens notre légère embarcation. Je ne savais que penser d’un phénomène tout nouveau et inconnu pour moi, et d’où pouvait peut-être résulter, d’un instant à l’autre, quelque danger ou accident sérieux, lorsque notre pilote s’écria tout à coup : « Voyez comme l’eau de la mer bout. » En effet, je me retournai du côté indiqué ; la mer semblait être en ébullition, et peu d’instants après un immense