Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/194

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Le long du fleuve de Siam, l’élégant feuillage des bambous et des palmiers se détache et se dessine gracieusement sur le ciel bleu, et le chant des oiseaux retentit de l’une à l’autre rive. Ici des troupes de marsouins bondissant hors de l’eau et courant le nez au vent, des pélicans s’ébattant sur ces eaux profondes, ou bien des cigognes et des hérons que l’approche de l’homme fait fuir silencieusement du milieu des roseaux, viennent seuls nous distraire de notre pénible navigation.

Nous passons devant la grande île de Ko-Sutin, distante de quarante milles au plus de Penom-Penh, et que nous n’atteignons qu’après cinq jours d’une marche difficile et laborieuse. Le courant est si fort qu’à chaque détour du fleuve nous sommes obligés, tout en redoublant d’efforts avec nos rames, de nous cramponner aux joncs de la rive pour ne pas être entraînés en arrière.

Plus on remonte vers le nord, plus on trouve le courant rapide ; c’est au point qu’à l’époque des grandes eaux on ne fait guère qu’un ou deux milles Par jour, et que les rameurs vont souvent le soir chercher à pied du feu à l’endroit où ils ont fait cuire le riz le matin.

À vingt-cinq ou trente lieues au nord de Ko-Sutin, sur les confins du Laos, commencent les rapides et les cataractes ; il faut alors quitter les bateaux pour prendre des pirogues que l’on est souvent obligé de transporter à dos d’homme, ainsi que tout le bagage, pour franchir ces passages. Je ne m’arrêtai à Ko-Sutin que quelques heures, et seulement afin de serrer la main à un autre pionnier de