Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/244

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que l’on trouve de l’ancienne civilisation de ces lieux.

Arrivés à Ongkor, nous fîmes halte dans un petit caravansérail à moitié détruit par les voyageurs de toute espèce, qui en ont arraché tout ce qu’ils ont pu de bois pour faire cuire leur riz. Le Cambodgien n’est pas hospitalier, et il n’admet que rarement un étranger dans son intérieur ; s’il le fait, ce n’est que pour un temps très-limité, contrairement aux usages des pays voisins.

Nokhor ou Ongkor était la capitale de l’ancien royaume du Cambodge, ou de Khmer, si fameux autrefois parmi les grands États de l’Indo-Chine, que la seule tradition encore vivante dans le pays rapporte qu’il comptait cent vingt rois tributaires, une armée de cinq millions de soldats, et que les bâtiments du trésor royal couvraient à eux seuls un espace de plusieurs lieues.

Dans la province qui a conservé le même nom et qui est située à l’est du grand lac Touli-Sap, vers le quatorzième degré de latitude et le cent deuxième de longitude à l’orient de Paris, se trouvent des ruines si imposantes, fruit d’un travail tellement prodigieux, qu’à leur aspect on est saisi de la plus profonde admiration, et que l’on se demande ce qu’est devenu le peuple puissant, civilisé et éclairé, auquel on pourrait attribuer ces œuvres gigantesques.

Un de ces temples surtout, qui figurerait avec honneur à côté de nos plus belles basiliques, et qui l’emporte pour le grandiose sur tout ce que l’art des Grecs ou des Romains a jamais édifié, fait un contraste étonnant et pénible avec le triste état de bar-