Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/288

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qu’il s’amusait avec la foule d’enfants et de curieux qui venaient le visiter, il avait été d’une grande douceur ; mais pour la route, ayant été placé à l’attache derrière une des voitures, la peur lui rendit sa sauvagerie, et il fit tous ses efforts pour briser sa chaîne, se frappant, cherchant à se cacher, pleurant et jetant des cris perçants. Cependant, peu à peu, il s’habitua à sa chaîne et redevint aussi doux et aussi tranquille qu’auparavant.

Le fusil sur l’épaule, moi et mon jeune Chinois Phraï, nous suivions ou devancions nos équipages, tout en chassant sur la lisière des forêts. Quant à mon autre domestique, saisi du mal du pays en arrivant à Pinhalù, il avait manifesté le désir de retourner à Bangkok par le même chemin que nous avions pris à notre arrivée. Je ne cherchai pas à le retenir malgré lui, et je lui payai son voyage de retour en lui souhaitant bonne chance.

À peine avions-nous parcouru un mille que notre voiturier nous demanda la permission de nous arrêter pour souper, afin que ce repas important nous mit a même de repartir et de voyager une partie de la nuit. J’y consentis pour ne pas heurter l’habitude des Cambodgiens, qui, lorsqu’ils se mettent en route pour un long voyage, font toujours une halte près de leur village afin d’avoir le plaisir de retourner au logis verser une dernière larme et boire une dernière goutte.

Les bœufs n’étaient pas encore dételés que toute la famille de nos voituriers était accourue, chacun parlant à la fois et me priant de bien soigner ses parents, de les protéger contre les voleurs, et de