Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/91

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l’émunération de tous les titres de Sa Majesté siamoise tiendrait plus d’une page. Vingt-six années d’études solitaires n’avaient pas été sans fruits pour l’âme honnête de ce monarque. Il avait vu, pendant ce quart de siècle, grandir irrésistiblement la puissance des Anglais sur cette terre de l’Inde, berceau des plus antiques traditions et des dieux de son peuple, et la domination néerlandaise sur le grand archipel malais, auquel les intérêts commerciaux d’une grande partie de ses États sont entièrement liés. Dans le même temps il avait été témoin de la chute et du dépècement du royaume birman, si longtemps le rival et la terreur du sien ; enfin des signes manifestes de la décadence du Céleste Empire, modèle et régulateur séculaire de tous les États de l’extrême Orient, n’avaient pu lui échapper. Salutaires spectacles pour des yeux intelligents !… Phara-Somdetch y puisa, sinon une conviction bien arrêtée, du moins une tendance à se tourner vers l’Occident pour y chercher des conseils et des appuis, puisque c’est de là que rayonne aujourd’hui la lumière. Il sortit de sa retraite claustrale avec un grand fonds de tolérance. Une de ses premières mesures fut la révocation d’un arrêt d’exil qui frappait plusieurs missionnaires. Dans l’audience qu’il accorda à l’évêque Pallegoix, partant pour l’Europe en 1852, il lui remit pour le pape une lettre autographe écrite en langue anglaise, et dans laquelle il exprimait sa haute considération pour le chef du culte catholique, et lui communiquait en même temps sa résolution d’accorder à cette religion, dans ses États, toutes les libertés dont elle pourrait avoir besoin. Il ajoutait