Page:Mouhot - Voyage dans les royaumes de Siam, de Cambodge, de Laos et autres parties centrales de l'Indo-Chine, éd. Lanoye, 1868.djvu/95

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raignée que l’on trouve aussi, je crois, au Cap, et que l’on pourrait élever pour en tirer la soie ; en saisissant le bout de celle-ci qui lui sort du corps, on n’a qu’à dévider, dévider toujours ; le fil est très-fort, élastique, et ne se rompt jamais pendant l’opération.

Que le peuple, dans ce pays, serait heureux s’il ne croupissait pas dans l’esclavage le plus abject ! La nature féconde, cette excellente mère, le traite en enfant gâté : elle l’ait tout pour lui. Les arbres des forêts sont chargés de légumes et de fruits exquis ; les rivières, les lacs et les étangs abondent en poissons ; quelques bambous suffisent pour la construction d’une maison. Le débordement périodique des eaux se charge dans la plaine de rendre la terre d’une fertilité extraordinaire. Ici, l’homme n’a qu’à semer et planter ; il abandonne le soin du reste au soleil, et il ne connaît ni ne sent le besoin de tous ces objets de luxe qui font partie de la vie de l’Européen.

Le 13 novembre nous arrivâmes à un village nommé Arajiek ; le terrain y était déjà plus élevé, et, pouvant enfin mettre le pied sur la terre ferme et battre la campagne, je tuai plusieurs écureuils blancs que je n’avais pas rencontrés dans les environs de Bangkok. Plusieurs semaines de courses et de voyages ne m’ont pas encore habitué à ce cri perçant que l’ont entendre pendant toute la nuit des milliers de cigales et d’autres insectes qui semblent ne dormir jamais. C’est sur les deux rives un mouvement et un bruit continuels.

À peine le soleil commence-t-il à dorer la cime des arbres que les oiseaux, toujours alertes et gais, entonnent chacun leur hymne du matin ; c’est un con-