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ccccxxvi, 5), que je choisis parmi cent exemples, et la transcription λαυγουνησία (Ptolém.) indiquent assez clairement comment la prononciation de -éns-is a fini par se résoudre dans le son français -ais.

De même, le nom moderne de Rennes provient directement de l’un des cas obliques (Redonas, Redonis) de la forme topologique qui avait depuis longtemps supplanté l’ethnique Redones. La transformation s’explique aisément. En effets la brièveté de la pénultième prouve que l’accent tonique était fixé sur la première syllabe ; il en est résulté que les voyelles des syllabes suivantes, privées de l’appui de la voix, sont passées à l’état de muettes, Réd’nes ; mais les consonnes médianes, ainsi mises en contact immédiat, ne pouvaient se prononcer sans une certaine accommodation, et le d ne tarda pas à se convertir en n, par assimilation avec la voyelle suivante, Rén-nes.

Par des procédés phonétiques qui lui sont propres, et dont Zeuss a amplement traité dans son ouvrage capital (Gramm. Celt., 1re édit., p 113 et p. 164), le breton armoricain fit subir une autre transformation au nom de lieu Redonas, en l’amenant à la forme Roazon, Roazun, et voici comment. En premier lieu, le ē long de la première syllabe se diphthongue régulièrement en oa ; c’est ainsi que les mots latins clēric-us, cēr-a sont devenus en b.-bret. cloarec, coar. En second lieu, le d s’affaiblit en z ; comparez, en effet, lat. ord-o avez bret. urz, vieux bret. bled avec bret. modern. bleiz « loup », et, parmi les noms propres, Judith avec Juzeth, (Chart. Cor., ap., D. Mor., 378), Gaufridus, Judicael (Chart. Roton., passim), avec les formes modernes Jaffrez, Jézéquel. Des traces de cette prononciation sifflante se laissent même entrevoir dans le dialecte français de la Haute-Bretagne ; c’est du moins ce que l’on peut inférer de certains passages d’un manuscrit du xve siècle, le Missel de Michel Guibé, où on lit Morzelaise pour Mordelaise (Bullet. Assoc. Bret., t. II, p. 168). Quant aux désinences latines -as, -is, le b.-bret. les a complètement laissé tomber.

Une dernière observation, sur laquelle j’insiste tout particulièrement. Je sais que quelques personnes, embarrassées de la présence d’un I à la suite de la lettre R dans la dernière ligne du fragment