Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, I.djvu/162

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abondante qui rendit sans effet les ressources de la mousqueterie.

L’armée de Silésie et la grande armée des alliés, ayant surmonté tous les obstacles, se mettent, sur trois colonnes, en pleine marche sur Paris, par la rive droite de la Marne, qu’elles passent à Trilport, Meaux et Lagny. L’Empereur de Russie et le roi de Prusse portent leur quartier général à Bondy. Napoléon a le sien à Troyes, d’où, par les routes détournées qu’il est obligé de prendre, il a cinquante lieues à faire pour arriver sous les murs de la capitale ; il fait ses dispositions pour que son armée y soit rendue le 2 avril. Le 30 mars, à dix heures du soir, il n’est, de sa personne, qu’à cinq lieues de cette ville ; en peu de temps, il pourrait se trouver à la tête de ceux qui la défendent ; il est trop tard : Paris a capitulé à cinq heures et demie. C’est à pied, sur la route et au relais de Fromenteau, que Napoléon apprend du général Belliard, un des défenseurs de la capitale, cette triste nouvelle. Il fait appeler le maréchal Berthier et le duc de Vicence, et leur dit : « Paris vient de capituler ; marchons sur Paris. » Belliard lui représenta qu’il n’y avait plus de troupes dans cette ville. « N’importe, répliqua-t-il, j’y trouverai la garde nationale ; l’armée m’y rejoindra demain ou après, et je rétablirai les affaires. — « Mais, Sire, répond le général Belliard, Votre Majesté s’expose à se faire prendre et à faire saccager Paris : il y a 130.000 hommes autour de la ville. »

Douloureusement frappé par ces nouvelles, il entra dans l’auberge de la Poste, où il resta pendant deux heures la tête appuyée dans ses deux mains. Enfin, poussé par les instances des généraux qui l’entouraient, il se détermina à retourner en arrière et à faire partir le duc de Vicence pour Paris, en qualité de négociateur. Le duc arriva dans cette ville le 31 mars, à sept heures du matin ; les autorités locales étaient absentes, il se rend au quartier général de l’empereur Alexandre, à Bondy. Ce prince, instruit de l’objet de sa mission, lui répondit qu’il remettait après son entrée à Paris, qui allait avoir lieu incessamment, la réponse qu’il jugerait à propos de lui faire. Caulincourt retourne à Paris et Napoléon va attendre à Fontainebleau le résultat de cette négociation.

Dans la soirée, un grand conseil est tenu chez l’empereur Alexandre, dans lequel on discuta vivement la possibilité de faire la paix avec Napoléon, la régence de l’impératrice Marie-Louise et le rétablissement des Bourbons. Lorsque l’abbé de Pradt, archevêque de Malices, qui, avec d’autres Français, faisait partie de cette réunion, eut déclaré que les Français étaient tous royalistes : Eh bien ! dit alors Alexandre, je promets que je ne traiterai plus avec Napoléon. Le lendemain, on lut sur les murs de Paris une proclamation qui exprimait cette pensée. Et cependant, malgré cette déclaration solennelle, le duc de Vicence, bien reçu par Alexandre, avait encore le courage de plaider devant lui la cause de son souverain, qu’il était loin de croire comme perdue.

Dans ces graves circonstances, le Sénat, prenant l’initiative, organisa un gouvernement provisoire ; il déclara en outre Napoléon déchu du trône, le droit d’hérédité aboli dans sa famille, le peuple français et l’armée déliés envers lui du serment de fidélité.

Une multitude d’ingrats, civils et militaires, dont la plupart devaient à Napoléon leurs honneurs, s’empressa d’applaudir à la déchéance de leur maître. Les alliés eux-mêmes furent révoltés de tant de lâcheté.

Dans ces conjectures, le duc de Vicence,