Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/313

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les mauvais exemples du passé parmi les motifs d’excuses que le Prince-Régent pouvait donner. En mettant cette lettre en pleine lumière, j’ai devancé la marche des événements, pour faire comprendre, dès à présent, combien Havelaar devait peu s’attendre à être soutenu par le contrôleur, pour peu qu’il fallût appeler toute chose importante, de son véritable nom.

Pourtant ce dernier était un honnête homme, très probablement, du moins.

Mais, tout honnête qu’il fût, il avait besoin d’être traité de la sorte pour en arriver à dire la vérité, là où il ne s’agissait que de déclarer le prix du bois, de la pierre, de la chaux et des salaires.

Ainsi, Havelaar n’avait pas seulement à combattre l’influence des personnes qui profitaient du crime, il devait lutter contre la lâcheté de ceux qui, quoique de son avis, ne se croyaient pas de taille à s’y opposer bravement.

Peut-être aussi, après la lecture de cette lettre, reviendra-t-on, tant soit peu, sur le mépris éprouvé pour la soumission servile du Javanais, qui, en présence de son chef, retire lâchement la plainte la mieux fondée.

En effet, s’il y a tant de motifs de terreur pour le fonctionnaire européen, qui est bien moins exposé à la vengeance de son supérieur, que doit donc redouter le pauvre paysan, qui, dans un village, éloigné du chef-lieu, retombe entre les mains des oppresseurs qu’il a osé accuser et dénoncer.

Est-il extraordinaire que ce malheureux, effrayé des suites de son audace, s’efforce de les esquiver ou de les atténuer par son humble soumission !

Et il n’y avait pas que Dipanon, qui fît son devoir en tremblant, comme s’il ne l’avait réellement pas rempli.