Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/59

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contenterait de quatre cents francs. Mais je ne répondrai pas de sa conduite… Un homme qui porte un châle ! Et puis, je ne sais pas où il demeure.

Deux jours après, le jeune Stern et Frédéric assistaient à une vente de livres, à l’hôtel des Armes de Berne. J’avais interdit à Frédéric d’acheter quoi que ce fût, mais Stern, qui reçoit beaucoup d’argent de poche, rapporta quelques chiffons. C’est son affaire. Voilà que Frédéric prétendit avoir vu l’Homme-au-châle qui semblait être préposé à la vente. Il avait retiré les livres des armoires, et les avait placés sur la table longue, devant le crieur. Toujours, au dire de Frédéric, il était très pâle, et un monsieur, qui avait l’air d’un surveillant, l’aurait réprimandé pour avoir laissé tomber deux années de l’Aglaja, ce que je trouve aussi fort maladroit, l’Aglaja étant une collection charmante à l’usage des dames. Marie l’a de moitié avec les Rosemeyer qui font les sucres. Elle brode au crochet, d’après cela, je veux dire d’après l’Aglaja. Dans cette petite altercation, Frédéric entendit que notre homme gagnait trente sous par jour.  » Pensez-vous que j’aie l’intention de vous jeter trente sous par jour, en pure perte ! » avait crié ce monsieur. Je calculai que trente sous par jour, — si les dimanches et fêtes avaient été payés, il aurait parlé d’une somme annuelle ou mensuelle, — font quatre cent cinquante francs par an. Je me décide vite. Quand on est dans les affaires depuis si longtemps on sait tout de suite quel est le parti à prendre. Le lendemain matin j’étais chez Tiredon. C’est le nom du libraire chargé de la dite vente. Je demandai l’homme qui avait laissé tomber l’Aglaja. — « Nous l’avons mis à la porte, » me répondit Tiredon : « il était paresseux, maladif et pédant. » — J’achetai une boîte