Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/82

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le remplacer ; tandis que la disposition plus ou moins mauvaise d’un Régent pourrait causer des troubles et des insurrections.

De cet ensemble de circonstances il résulte une situation singulière qui fait que, dans la réalité des choses, l’inférieur commande au supérieur. Le sous-préfet ordonne au Régent de lui adresser ses rapports, d’envoyer du monde pour travailler aux ponts et chaussées, de faire rentrer les contributions ; il le convoque au conseil qu’il préside, il le réprimande en cas de malversation.

Ces relations d’une espèce toute particulière ne sont acceptables que grâce à des manières extrêmement polies, qui n’excluent pourtant ni la cordialité, ni, au besoin, la rigueur. Le ton qui doit présider à ces relations compliquées est on ne peut mieux indiqué dans l’instruction suivante : „ Le fonctionnaire européen devra traiter comme son frère cadet le fonctionnaire indigène qui l’assiste. ”

Mais qu’il n’oublie pas que ce frère cadet est très-aimé — ou redouté — par les siens, et qu’en cas de démêlés on reprochera tout de suite à son aîné de ne pas le traiter avec assez d’indulgence.

Toutefois, la politesse innée des grands de Java, — tout javanais est infiniment plus poli que l’européen de la condition équivalente, — rend plus supportable qu’elle ne le serait ailleurs cette position difficile.

Que l’Européen soit bien élevé, discret ; qu’il se comporte avec une dignité affable, et il peut être certain que le Régent, de son côté, lui rendra l’administration facile. L’ordre le plus dur, exprimé sous forme de demande, est ponctuellement exécuté. La différence de rang, de naissance, de richesse est effacée par le Régent lui-même, qui attire à lui l’Eu-