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LE DYCH TAU

sérieuse. On considère habituellement, je le sais, deux hommes comme constituant une caravane trop peu nombreuse pour travailler sérieusement dans la montagne. N’empêche que sur des rochers brisés, ou sur des arêtes et des rocs en saillie garnis de blocs de neige glacée sans adhérence, ils y a, autant que j’en puis juger, un avantage tel à n’être que deux, que de ce nombre je fais presque le nombre idéal.

Heureusement, cinq minutes me suffisent à reprendre mes sens, et nous quittons ce couloir mal élevé, nous portant encore plus à droite à travers des rocs désagrégés et des pierres folles. Grâce à une marche rapide, nous atteignons, à 7 h. mat., la grosse masse de rochers rouges indiquée par M. Donkin, comme marquant le terme de la tentative qu’il fit en compagnie de M. Dent[1]. Sans faire halte, nous poussons plus loin, nous portant toujours sur la droite pour atteindre le plus petit des deux longs couloirs qui se trouvaient bien visibles de notre camp. Ce couloir remonte la face du pic vers la grande arête Sud-Ouest, au voisinage même du sommet. Zurflulh avait la veille au soir diagnostiqué qu’il était en neige, et, comme les rochers étaient pour la plupart verglassés et distinctement difficiles, nous pensions qu’il était désirable de l’atteindre aussi tôt que possible. Quand, à la fin, nous en avons gagné les bords, nous voyons d’un regard qu’il est beaucoup plus rapide que nous ne l’avons imaginé, et que — l’on me pardonnera cette assertion digne de Calino — la neige est de la glace. En conséquence, nous nous maintenons sur le rocher tant que nous faisons des progrès suffisants ; et c’est seulement lorsque chaque mètre d’avance

  1. Dans leur exploration de 1896, car dans l’expédition de 1888 qui coûta la vie à W. F. Donkin, C. T. Dent fut arrêté en Suanétie par une indisposition. — M. P.