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LE DYCH TAU

que même un Monsieur ne peut pas perdre le bon chemin, Zurfluh est saisi du désir de montrer au Tartare comment l’on doit traverser des pentes faciles, et le voici lancé vers le col avec la vitesse, la facilité et la grâce d’un chasseur de chamois aguerri. Quand un homme est dépassé sans espoir par son compagnon, il éprouve toujours grand plaisir à voir ce même compagnon manquer la route de descente la plus facile. J’éprouvai ce grand plaisir en voyant Zurfluh prendre, après avoir atteint le col, la direction que nous avions suivie le matin. L’escalade que j’avais faite dans mon exploration préparatoire m’avait montré un couloir de neige commode dans lequel était possible une glissade debout extrêmement rapide. Après avoir atteint cette grande route, je file en bas jusqu’au petit glacier. Je le traverse en courant, je m’assieds confortablement sur mon chapeau et je glisse le long de ces grandes pentes jusqu’en bas, presque jusqu’à la tente, où Zurfluh est encore occupé il sortir la neige de ses poches.

Le porteur m’accueille avec de grands cris de «Allah il Allah ! Minghi Tau, Allah ! Allah ![1] »

Nous découvrons bientôt que, loin de consommer toutes nos provisions, le porteur n’a même pas pris une croûte de pain. Nous le pressons, pendant que la soupe cuit, de prendre un lunch, ou plutôt un déjeuner, mais il refuse et semble n’être pas pressé de dîner. Il arrange le feu avec beaucoup d’habileté, faisant brûler le plus mauvais des bois d’une façon vraiment incroyable, et il ne se repose que pour me décerner de temps en temps sur le dos une claque d’approbation. Comme il est encore

  1. Allusion probable à ce qu’il jugeait A. F. Mummery digne de faire la plus haute montagne du Caucase, l’Elbrouz, dont le nom local est Minghi Tau, (littéralement le blanc sommet). — M. P.