Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/275

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Valbrun.

Parlez-vous ainsi de la comtesse ?

Prévannes.

Pourquoi donc pas ? Sur ce point-là aussi, allez-vous encore me chercher chicane ?

Valbrun.

Oui, morbleu, c’est trop ! J’ai pu supporter vos froides et cruelles railleries, mais vous insultez une femme que j’estime et que vous devriez respecter, puisque vous dites que vous l’aimez ; venez, monsieur, entrons chez elle. Je n’ai pas, dites-vous, le droit de la défendre ; eh bien ! ce droit que j’ai perdu, que vous m’avez ravi, que j’avais hier, je le lui redemanderai, fût-ce pour un instant, et elle me le rendra, je n’en doute pas. Toute perfide qu’elle est, je connais son cœur, et, malgré toutes vos trahisons, je l’ai tant aimée, qu’elle doit m’aimer encore. Je devais être son époux, je pouvais presque en porter le titre ; qu’elle me le prête un quart d’heure, me rendrez-vous raison ? Venez, monsieur, entrons ici.

Il va pour ouvrir la porte de la chambre de la comtesse.
Prévannes, l’arrêtant.

Dis donc, Henri, te souviens-tu que ce matin je te comparais à un âne qui n’ose pas franchir un ruisseau ?

Valbrun.

Qu’est-ce à dire ?

Prévannes.

Eh ! le voilà, le ruisseau : c’est cette porte ; allons,