Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/32

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qui ne lui seront pas données de longtemps. On ne connaîtra tout l’effet que ce drame peut produire au théâtre que le jour où le rôle d’André sera joué par un grand acteur.

La comédie des Caprices de Marianne suivit de très près André del Sarto, et trois mois plus tard, le 15 août 1833, parut Rolla. Stendhal admirait particulièrement ce poème. « Il y avait, disait-il un jour à Alfred de Musset, une lacune dans la littérature française. Il nous manquait un équivalent de ce Faust et de ce Mandred dont l’Allemagne et l’Angleterre s’enorgueillissent avec tant de raison. Cette lacune est comblée ; mais vous avez fait une grande nouveauté en donnant au doute l’accent de la prière. Cela ne s’était jamais vu, et soyez assuré qu’il vous en sera tenu compte. »

Il n’est pas inutile, en lisant Rolla, de se rappeler l’âge de l’auteur. Une connaissance si juste des sentiments et des inquiétudes d’une génération entière ne pouvait pas être le résultat de l’expérience dans un jeune homme de vingt-deux ans. En voyant les pas immenses que fait le poète d’un ouvrage à l’autre, on peut se demander si les épreuves auxquelles son cœur devait être bientôt soumis étaient nécessaires au complet développement d’un génie si précoce[1].

À l’automne de 1833, Alfred de Musset partit pour l’Italie. Il en revint au mois d’avril suivant, à peine rétabli

  1. La première de ces épreuves est connue. On me saura gré, je l’espère, de ne point revenir ici sur ce sujet. Je n’en ai parlé ailleurs que contraint et forcé par un devoir impérieux. Il existe dans les poésies d’Alfred de Musset des traces nombreuses de ce triste souvenir, — moins nombreuses cependant qu’on ne l’a cru jusqu’à présent, comme nous le prouverons tout à l’heure.