Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/255

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écouté ma conversation avec ma gouvernante, prends garde à tes oreilles.

Fantasio.

Non pas à mes oreilles, mais à ma langue. Vous vous trompez de sens ; il y a une erreur de sens dans vos paroles.

Elsbeth.

Ne me fais pas de calembour, si tu veux gagner ton argent, et ne me compare pas à des tulipes, si tu ne veux gagner autre chose.

Fantasio.

Qui sait ? Un calembour console de bien des chagrins ; et jouer avec les mots est un moyen comme un autre de jouer avec les pensées, les actions et les êtres. Tout est calembour ici-bas, et il est aussi difficile de comprendre le regard d’un enfant de quatre ans que le galimatias de trois drames modernes.

Elsbeth.

Tu me fais l’effet de regarder le monde à travers un prisme tant soit peu changeant.

Fantasio.

Chacun a ses lunettes ; mais personne ne sait au juste de quelle couleur en sont les verres. Qui est-ce qui pourra me dire au juste si je suis heureux ou malheureux, bon ou mauvais, triste ou gai, bête ou spirituel ?

Elsbeth.

Tu es laid, du moins ; cela est certain.