Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/274

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aurait peut-être… Ah ! il y a une providence ; lorsque Dieu m’a envoyé tout d’un coup l’idée de me travestir ; lorsque cet éclair a traversé ma pensée : « Il faut que je me travestisse, » ce fatal événement était prévu par le destin. C’est lui qui a sauvé de l’affront le plus intolérable la tête qui gouverne mes peuples. Mais, par le ciel ! tout sera connu. C’est trop longtemps trahir ma dignité. Puisque les majestés divines et humaines sont impitoyablement violées et lacérées, puisqu’il n’y a plus chez les hommes de notions du bien et du mal, puisque le roi de plusieurs milliers d’hommes éclate de rire comme un palefrenier à la vue d’une perruque, Marinoni, rends-moi mon habit.

Marinoni, ôtant son habit.

Si mon souverain le commande, je suis prêt à souffrir pour lui mille tortures.

Le Prince.

Je connais ton dévouement. Viens, je vais dire au roi son fait en propres termes.

Marinoni.

Vous refusez la main de la princesse ? elle vous a cependant lorgné d’une manière évidente pendant tout le dîner.

Le Prince.

Tu crois ? Je me perds dans un abîme de perplexités. Viens toujours, allons chez le roi.

Marinoni, tenant l’habit.

Que faut-il faire, altesse ?