Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies I.djvu/58

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Cordiani.

Elle m’aime, ô Damien, elle m’aime ! Que vas-tu me dire ? Je suis heureux. Regarde-moi, elle m’aime. Je cours dans ce jardin depuis hier ; je me suis jeté dans les herbes humides ; j’ai frappé les statues et les arbres, et j’ai couvert de baisers terribles les gazons qu’elle avait foulés.

Damien.

Et cet homme qui te surprend ! À quoi penses-tu ? Et André ! André, Cordiani !

Cordiani.

Que sais-je ? je puis être coupable, tu peux avoir raison ; nous en parlerons demain, un jour, plus tard ; laisse-moi être heureux. [Je me trompe peut-être, elle ne m’aime peut-être pas ; un caprice, oui, un caprice seulement, et rien de plus ; mais laisse-moi être heureux.

Damien.

Rien de plus ? et] tu brises comme une paille un lien de vingt-cinq années ? [et tu sors de cette chambre ?] Tu peux être coupable ? et les rideaux qui se sont refermés sur toi sont encore agités autour d’elle ? et l’homme qui te voit sortir crie au meurtre ?

Cordiani.

Ah ! mon ami, que cette femme est belle !

Damien.

Insensé ! insensé !

Cordiani.

Si tu savais quelle région j’habite ! comme le son