Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/205

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d’Alexandre. Chut ! ne répétez pas ceci comme venant de moi. Vous savez que je passe pour un homme sage et circonspect ; ne me faites point de tort, au nom de tous les saints ! La chose est plus grave qu’on ne pense ; je vous le dis comme à un ami.

L’orfèvre.

Allez vous promener ; je suis un homme vieux, mais pas encore une vieille femme. Le Côme arrive aujourd’hui, voilà ce qui résulte le plus clairement de notre affaire ; il nous est poussé un beau dévideur de paroles dans votre nuit de six Six. Ah ! mort de ma vie ! cela ne fait-il pas honte ? Mes ouvriers, voisin, les derniers de mes ouvriers frappaient avec leurs instruments sur les tables, en voyant passer les Huit, et ils leur criaient : « Si vous ne savez ni ne pouvez agir, appelez-nous, qui agirons. »

Le marchand.

Il n’y a pas que les vôtres qui aient crié ; c’est un vacarme de paroles dans la ville comme je n’en ai jamais entendu, même par ouï-dire.

L’orfèvre.

On demande les boules[1] ; les uns courent après les soldats, les autres après le vin qu’on distribue, ils s’en remplissent la bouche et la cervelle, afin de perdre le peu de sens commun et de bonnes paroles qui pourraient leur rester.

  1. On comprend qu’il s’agit ici d’élections (Voir page 206.)