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Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes I.djvu/225

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IX


Ce ne fut qu’au bout de quinze jours qu’elle fut entièrement hors de danger. Elle commença à se lever et à prendre quelque nourriture ; mais sa santé était détruite, et le médecin déclara qu’elle souffrirait toute sa vie.

Frédéric ne l’avait pas quittée. Il ignorait encore le motif qui lui avait fait chercher la mort, et il s’étonnait que personne au monde ne s’inquiétât d’elle. Depuis quinze jours, en effet, il n’avait vu venir chez elle ni un parent ni un étranger. Se pouvait-il que son nouvel amant l’abandonnât dans une pareille circonstance ? Cet abandon était-il la cause du désespoir de Bernerette ? Ces deux suppositions paraissaient également incroyables à Frédéric, et son amie lui avait fait comprendre qu’elle ne s’expliquerait pas sur ce sujet. Il restait donc dans un doute cruel, troublé par une jalousie secrète, retenu par l’amour et par la pitié.

Au milieu de ses douleurs, Bernerette lui témoignait la plus vive tendresse. Pleine de reconnaissance pour les soins qu’il lui prodiguait, elle était, près de lui, plus gaie que jamais, mais d’une gaieté mélancolique,