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VII


Il est singulier qu’aux choses de ce monde, ceux qui se trompent le mieux soient précisément ceux qui y sont intéressés. À la contenance de Gaston près de mademoiselle de Vercelles, le plus indifférent témoin aurait deviné qu’il en était amoureux. Cependant Margot ne le vit pas d’abord, ou plutôt ne voulut pas le voir. Malgré le chagrin qu’elle en éprouvait, un sentiment inexprimable, et que bien des gens croiraient impossible, l’empêcha longtemps de discerner la vérité : je veux parler de cette admiration que mademoiselle de Vercelles lui avait inspirée.

Mademoiselle de Vercelles était grande, blonde, avenante. Elle faisait mieux que plaire ; elle était, si l’on peut s’exprimer ainsi, d’une beauté consolante. Il y avait, en effet, dans son regard et dans son parler, un calme si singulier et si doux, qu’il n’était pas possible de résister au plaisir que causait sa présence. Au bout de quelques jours, elle témoigna à Margot beaucoup d’amitié ; elle lui fit même les premières avances. Elle lui enseigna quelques petits secrets de broderie et de tapisserie ; elle lui prit le bras à la promenade, et lui