Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes II.djvu/115

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et de passer ainsi toute sa vie. Il mourra bien des indifférents et même des philosophes avant que l’un d’eux explique une pareille fantaisie, mais elle existe.

« Lorsque j’étais enfant, je ne voyais pas Dieu, je ne voyais que le ciel, » est certainement un mot sublime, écrit, comme on sait, par un sourd-muet. Camille était bien loin de tant de force. L’image grossière de la Vierge, badigeonnée de blanc de céruse, sur un fond de plâtre frotté de bleu, à peu près comme l’enseigne d’une boutique ; un enfant de chœur de province, dont un vieux surplis couvrait la soutane, et dont la voix faible et argentine faisait tristement vibrer les carreaux, sans que Camille en pût rien entendre ; la démarche du suisse, les airs du bedeau, — qui sait ce qui fait lever les yeux à un enfant ? Mais qu’importe, dès que ces yeux se lèvent ?