Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes II.djvu/346

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— Le roi n’était pas à Trianon ; il était à la chasse, la marquise était seule,… n’est-ce pas ?

— Oui, madame.

— Elle venait de se réveiller ; elle était à peine vêtue, excepté, à ce qu’on dit, d’un grand peignoir.

— Les gens qu’on ne peut pas empêcher de parler disent ce qui leur passe par la tête.

— Fort bien, mais il paraît qu’il a passé entre sa tête et la vôtre un regard qui ne l’a pas fâchée.

— Qu’entendez-vous par là, madame ?

— Que vous ne lui avez pas déplu.

— Je n’en sais rien, et je serais au désespoir qu’une bienveillance si douce et si rare, à laquelle je ne m’attendais pas, qui m’a touché jusqu’au fond du cœur, pût devenir la cause d’un mauvais propos.

— Vous prenez feu bien vite, chevalier ; on croirait que vous allez provoquer toute la cour ; vous ne finirez jamais de tuer tant de monde.

— Mais, madame, si ce page est tombé, et si j’ai porté son message… Permettez-moi de vous demander pourquoi je suis interrogé.

Le masque lui serra le bras et lui dit : — Monsieur, écoutez.

— Tout ce qui vous plaira, madame.

— Voici à quoi nous pensons, maintenant. Le roi n’aime plus la marquise, et personne ne croit qu’il l’ait jamais aimée. Elle vient de commettre une imprudence ; elle s’est mis à dos tout le parlement, avec ses deux sous