Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Poésies II.djvu/106

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Notre premier baiser, ne t’en souviens-tu pas,
Quand je te vis si pâle au toucher de mon aile,
Et que, les yeux en pleurs, tu tombas dans mes bras ?
Ah ! je t’ai consolé d’une amère souffrance !
Hélas ! bien jeune encor, tu te mourais d’amour.
Console-moi ce soir, je me meurs d’espérance ;
J’ai besoin de prier pour vivre jusqu’au jour.


le poète

     Est-ce toi dont la voix m’appelle,
     Ô ma pauvre Muse ! est-ce toi ?
     Ô ma fleur ! ô mon immortelle !
     Seul être pudique et fidèle
     Où vive encor l’amour de moi !
     Oui, te voilà, c’est toi, ma blonde,
     C’est toi, ma maîtresse et ma sœur !
     Et je sens, dans la nuit profonde,
     De ta robe d’or qui m’inonde
     Les rayons glisser dans mon cœur.


la muse

Poète, prends ton luth ; c’est moi ton immortelle,
Qui t’ai vu cette nuit triste et silencieux,
Et qui, comme un oiseau que sa couvée appelle,
Pour pleurer avec toi descends du haut des cieux.
Viens, tu souffres, ami. Quelque ennui solitaire
Te ronge ; quelque chose a gémi dans ton cœur ;
Quelque amour t’est venu, comme on en voit sur terre,