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peine ; j’en achetai une autre, large à peu près de trois pieds et qui n’avait que trois rayons. J’y rangeai lentement et avec réflexion un petit nombre de volumes ; quant à mes cadres, ils demeurèrent vides longtemps ; ce ne fut qu’au bout de six mois que je parvins à les remplir à mon goût ; j’y plaçai de vieilles gravures d’après Raphaël et Michel-Ange[1]. »


Tous ces détails sont parfaitement exacts. J’assistais à l’auto-da-fé des gravures et au déménagement de la bibliothèque. Les livres conservés, que le malade appelait ses vieux amis, étaient les classiques français du XVIIe siècle, Sophocle, Aristophane, Horace, Shakspeare, lord Byron, Gœthe, les quatre grands poètes italiens en un seul volume, Boccace, Rabelais, Mathurin Régnier, Montaigne, le Plutarque d’Amyot et André Chénier. Le petit volume de Léopardi fut ajouté plus tard à cette collection choisie. Les cadres étaient vides depuis longtemps, lorsque Tattet apporta, un jour, une très belle gravure de la Sainte Cécile de Raphaël.

« J’espère, dit-il, que ce maître-là trouvera grâce devant votre sévérité. »

Alfred admira la gravure et voulut l’encadrer lui-même. Bientôt vinrent se grouper autour de la Sainte Cécile, la Vierge à la chaise, celle aux Candélabres, la Poésie du Vatican, la Sainte Catherine d’Alexandrie, l’Alerte au camp de Michel-Ange et le Goliath de Jules

  1. Extrait d’un ouvrage inédit d’Alfred de Musset : le Poète déchu.