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mais nous nous étions enrichis de la déportation et de la complicité morale.

Pendant ce temps-là, Alfred de Musset travaillait à la Confession d’un enfant du siècle. Sans cesser d’aller dans le monde, il écrivait chaque soir un nombre effrayant de ces pages où l’on sent, en les lisant, que sa plume trépidait. Un nouvel incident vint encore interrompre l’auteur dans son travail. Il rentra un soir à la maison fort troublé par quelques mots à double sens qu’une femme venait de lui dire, en les accompagnant de regards plus significatifs que ses paroles. Brouillé comme il l’était avec l’amour, et à peine guéri de cette maladie, Alfred observa les entourages de cette femme avec défiance, et il crut découvrir des indices d’une conspiration entre deux personnes contre son repos. Il n’attendit pas longtemps pour se plaindre. La jeune femme se disculpa complètement ; mais, en se défendant d’avoir voulu inspirer de l’amour, elle ne se défendit pas moins bien d’en ressentir, de sorte que l’accusateur se trouva vis-à-vis d’elle dans une position embarrassante[1].

Alfred de Musset, obligé de revenir de ses injustes soupçons, se demanda ce qui serait arrivé s’ils eussent été fondés, et, en un moment, il imagina toute la comédie du Chandelier.

  1. J’ai déjà raconté en peu de mots cette histoire dans la Notice jointe aux Œuvres posthumes. Je ne vois pas d’inconvénient aujourd’hui à donner de plus amples détails.
    P. M.