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nos plaisirs. Rien n’égalait, aux yeux de Fanny, les transports de son amie. Nos plus forts accès lui semblaient de froides caresses, comparées aux fureurs qu’elle avait connues dans cette nuit funeste.

Elle m’avait juré de ne plus revoir Gamiani, mais son serment n’éteignait pas le désir qu’elle nourrissait en secret. Vainement elle luttait : ce combat intérieur ne servait qu’à l’irriter davantage. Je compris bientôt qu’elle ne résisterait pas. J’avais perdu sa confiance, il fallut me cacher pour l’observer.

À l’aide d’une ouverture habilement pratiquée, je pouvais la contempler chaque soir à son coucher. La malheureuse ! je la vis souvent pleurer sur son divan, se tordre, se rouler désespérée, et tout à coup déchirer, jeter ses vêtements, se mettre nue devant une glace, l’œil égaré comme une folle. Elle se touchait, se frappait, s’excitait au plaisir avec une frénésie insensée et brutale ; je ne pouvais plus la guérir, mais je voulais voir jusqu’où se porterait ce délire des sens.