Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, 1840.djvu/167

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ni la prière ne me servait de rien, je me retournai tout à coup et lui pris les deux bras. « Qu’est-ce à dire, monsieur ? voulez-vous user de violence ? – Non ; mais je veux que vous parliez. – Monsieur, je n’ai peur de personne, et je vous ai dit ce que je devais. – Vous avez dit ce que vous deviez et non ce que vous savez. Madame Pierson n’est point malade ; je le sais, j’en suis sûr. – Qu’en savez-vous ? – La servante me l’a dit. Pourquoi me ferme-t-elle sa porte, et pourquoi est-ce vous qu’elle en charge ? » Mercanson vit passer un paysan. « Pierre, lui cria-t-il par son nom, attendez-moi, j’ai à vous parler. » Le paysan s’approcha de nous ; c’était tout ce qu’il demandait, pensant bien que, devant un tiers, je n’oserais le maltraiter. Je le lâchai en effet, mais si rudement qu’il en recula, et que son dos frappa contre un arbre. Il serra le poing et partit sans mot dire. Je passai toute la semaine dans une agitation extrême, allant trois fois le jour chez madame Pierson, et constamment refusé à sa porte. Je reçus d’elle une lettre ; elle me disait que mon assiduité faisait jaser dans le pays, et me priait que mes visites fussent plus rares dorénavant. Pas un mot, du reste, de Mercanson ni de sa maladie. Cette précaution lui était si peu naturelle, et contrastait d’une manière si étrange avec la fierté indifférente qu’elle témoignait pour toute espèce de propos de ce genre, que j’eus d’abord peine à y croire. Ne sachant cependant quelle autre interprétation trouver, je lui