neige. Elle s’y enfermait quelquefois, mais rarement, depuis que je vivais chez elle.
Je me penchai contre la porte, et je vis Brigitte assise à terre au milieu de fleurs qu’elle venait de jeter. Elle tenait une petite couronne qui me parut être d’herbes sèches, et elle la brisait entre ses mains.
« Que faites-vous donc ? » lui demandai-je. Elle tressaillit et se leva. « Ce n’est rien, dit-elle, un jouet d’enfant ; c’est une vieille couronne de roses qui s’est fanée dans cet oratoire ; il y a longtemps que je l’y avais mise ; je suis venue pour changer mes fleurs. »
Elle parlait d’une voix tremblante et paraissait prête à défaillir. Je me souvins de ce nom de Brigitte-la-Rose, que je lui avais entendu donner. Je lui demandai si par hasard ce n’était pas sa couronne de rosière qu’elle venait de briser ainsi.
« Non, répondit-elle en pâlissant.
— Oui, m’écriai-je, oui, sur ma vie ! Donnez-m’en les morceaux. »
Je les ramassai et les posai sur l’autel, puis je restai muet, les yeux fixés sur ce débris.
« N’aurais-je pas raison, dit-elle, si c’était ma couronne, de l’avoir ôtée de ce mur où elle était depuis si longtemps ? À quoi ces ruines sont-elles bonnes ? Brigitte-la-Rose n’est plus de ce monde, pas plus que les roses qui l’ont baptisée. »
Elle sortit ; j’entendis un sanglot et la porte se ferma sur moi, je tombai à genoux sur la pierre, et je pleurai amèrement.
Lorsque je remontai chez elle, je la trouvai assise à table ; le dîner était prêt, et elle m’attendait. Je pris ma place en silence, et il ne fut pas question de ce que nous avions dans le cœur.