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En France, de nos jours, on distingue la morue et le cabillaud. La morue est le poisson préparé, le cabillaud, la morue fraîche. Cette distinction n’existait pas à l’origine.

La morue « morua, moruta, moruca », dans le langage courant « moulue ou moullue », forme qui existe encore à la campagne, figure

    Scheler objecte, avec raison, qu’on ne voit pas comment le français aurait emprunté, pour dénommer la morue, un mot à l’espagnol qui la dénomme tout autrement. Suivant M. Baudry, molue est la forme dégénérée de merlus ; cela est vraisemblable. C’est à cette dernière opinion que nous nous rattacherons. Les Anglais, nous l’avons vu, appellent parfois la morue, merluche, or le nom de merluche est encore employé par les pêcheurs pour désigner une variété du merlu. Pour mieux dire, nous croyons que les noms des deux poissons ont la même étymologie ; qu’on a même quelquefois donné indifféremment le même nom aux deux, et sans recourir au wallon, nous en trouverions l’origine simplement dans le latin ; la morue et le merlu étant des poissons relativement mous par rapport aux autres poissons de mer, le mot primitif, merlu ou mollue, moulue sera sorti d’un diminutif de mollis.

    Cabillaud, kabbeljouve ou cabliauwe. — Ce serait, d’après Littré, un dérivé, par renversement, de bacailhaba, nom basque de la morue, d’où serait venu l’espagnol bacalao et le flamand bakkeljav. On trouverait le radical belche, balche, comme nom de poisson sur un registre de Saint-Gall, dès 1360, d’où le plus moderne bolck dans le même sens ; mais il s’agirait d’une sorte de saumon ; on a aussi des exemples de kabelow et kabblaw dès 1381. (Cf. Kohl,