Page:Musset - Premières Poésies Charpentier 1863.djvu/272

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Vous verrez tout à l’heure, avec ma belle robe
Et mon tablier vert. — Vous riez, vous riez ?

FRANK.

Dans une heure d’ici nous serons mariés.
Ce baiser que tu fuis, et que je te dérobe,
Tu me le céderas, Mamette, de bon cœur.
Dans une heure, ô mon Dieu ! tu viendras me le rendre.
Mamette, je me meurs.

DÉIDAMIA.

Mamette, je me meurs.Ah ! moi, je sais attendre !
Voyons, laissez-moi donc être un peu votre sœur.
Une heure, une heure encore, et je serai ta femme.
Oui, je vais te le rendre, et de toute mon âme,
Ton baiser dévorant, mon Frank, ton beau baiser !
Et ton tonnerre alors pourra nous écraser.

FRANK.

Oh ! que cette heure est longue ! oh ! que vous êtes belle !
De quelle volupté déchirante et cruelle
Vous me noyez le cœur, froide Déidamia !

DÉIDAMIA.

Regardez, regardez, la tête est toujours là.
Qui donc nous guette ainsi ?

FRANK.

Qui donc nous guette ainsi ?Mamette, ô mon amante !
Ne me détourne pas cette lèvre charmante.
Non ! quand l’éternité devrait m’ensevelir !

DÉIDAMIA.

Mon ami, mon amant, respectez votre femme.

FRANK.

Non ! non ! quand ton baiser devrait brûler mon âme !
Non ! quand ton Dieu jaloux devrait nous en punir !