NOTES 1055
I. Françoise Thouret ose affirmer : " Quelles que soient les surprises que l'avenir me réserve, il n'y aura rien dans mon destin que ma nature n'explique et que ma raison ne justifie. " Sa raison, c'est le déterminisme scientifique ; sa nature, c'est la passion sensuelle. Vainement son fiancé Gérard lui apprend qu'il est atteint de phtisie ; Françoise ne veut pas attendre, force Gérard de l'épouser. Lui, croit qu'elle s'est sacrifiée ; et, parce qu'il se sent indigne d'une si haute charité, il a honte de ses caresses, de ses désirs, aspire à renier sa vie charnelle, et s'engage dans les voies de la perfection mystique. Aux yeux de Françoise, cette sainteté qui endort et paralyse n'est que l'œuvre de la maladie. Or, elle a beau crier l'aveu des convoi- tises auxquelles elle a résolument cédé ; Gérard ne voit plus en elle, qui crut vouloir, qu'une enfant irresponsable, chargée par Dieu d'une tâche obscure — la tâche de son salut. Françoise l'entend sans être convertie, mais non sans que son désarroi la détache de cette vaine science à qui l'individu reste un mystère : ainsi la raison n'éclaire plus, ne borne plus ses désirs ; elle prend pour amant son ancien maître ; et quand Gérard, ramené sur la terre par l'aveu de sa femme, lui offre et lui redemande le même amour qu'autrefois, elle choisit d'avouer encore, plutôt que de se partager. Gérard rentre en lui-même, et proclame sa foi : Passion impure, sacrifice mensonger, trahison vile, pour Françoise, ne sont rien qu'effets de forces naturelles, mais sont, pour Gérard, signes et moyens d'élection, mystérieux instruments de la Grâce. Il meurt en disant : " Dieu est libre. "
II. Moirans est le champion éloquent de la cause catholique. Croit-il lui-même à cette religion qu'il défend î Oui sans doute, si la croyance n'est rien que l'affirmation même ; si croire, c'est adhérer avec amour à un beau rêve qu'on sait n'être qu'un rêve, et s'en servir pour mettre en fuite les rêves ignobles ou médiocres qui font déchoir l'humanité. " Qu'est ce que la vérité d'une croyance ï Pensez- vous donc qu'on croie à Dieu
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