270 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
— Blafaphas n'est pas quelqu'un ; et nous lui recom- manderons de garder cela pour lui seul, strictement.
— Comment veux-tu partir sans qu'on le sache ?
— On saura que je pars, mais on ne saura pas où je vais. Puis, se tournant vers elle, sur un ton pathétique, il implorait : Arnica, ma chérie... laisse-moi y aller.
Elle sanglotait. A présent c'était elle qui réclamait l'appui de Blafaphas. Amédée l'allait quérir, quand, de lui-même, l'autre s'amena, frappant à la vitre du salon d'abord, selon son habitude.
— Voilà bien la plus curieuse histoire que j'aie entendue de ma vie, s'écria-t-il dès qu'on l'eut mis au fait. Non ! mais en vérité, qui se serait attendu à rien de pareil ? — Et brusquement, avant que Fleurissoire eût rien dit de ses intentions : — Mon ami, nous n'avons qu'une chose à faire : Y partir.
— Tu vois, dit Amédée, c'est sa première pensée.
— Moi, malheureusement, je suis retenu par la santé de mon pauvre père, fut la seconde.
— Après tout, il vaut mieux que je sois seul, reprit Amédée. A deux, nous nous ferions remarquer.
— Vas-tu seulement savoir comment t'y prendre ? Alors Amédée levait le haut du corps et les sourcils,
avec l'air de dire : Je ferai de mon mieux, que veux-tu? Blafaphas continuait :
— Vas- tu savoir à qui t'adresser ? Où aller ?... Au juste qu'est-ce que tu vas faire là-bas ?
— D'abord reconnaître ce qui en est.
— Car enfin, si rien de tout cela n'était vrai ?
— Précisément, je ne peux pas rester dans le doute. Et Gaston s'écriait aussitôt :
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