290 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
Amédée acceptait le tutoiement pour une coutume italienne ; il ne songeait plus à présent qu'à se coucher ; mais Carola ne semblait point prête à partir ; alors, emporté par la politesse, il causa.
— Vous parlez français aussi bien qu'une Française.
— C'est pas étonnant ; je suis de Paris. Et vous.
— Moi je suis du midi,
— J'avais deviné ça. En vous voyant, je me disais : ce Monsieur doit être de la province. C'est la première fois que vous venez en Italie ?
— La première.
— Vous venez pour des affaires.
— Oui.
— C'est beau, Rome. Il y a beaucoup à voir.
— Oui... Mais ce soir je suis un peu fatigué, hasardait-il ; et, comme pour s'excuser : — Je voyage depuis trois jours.
— C'est long pour venir ici.
— Et je n'ai pas dormi depuis trois nuits.
A ces mots Madame Carola, avec cette subite familia- rité italienne qui ne laissait pas d'interloquer encore Fleu- rissoire, lui pinçant le menton :
— Polisson ! fît-elle.
Ce geste ramena quelque peu de sang au visage d' Amé- dée qui, soucieux d'écarter aussitôt l'insinuation désobli- geante, parla puces, punaises, moustiques, longuement.
— Ici tu n'auras rien de tout cela. Tu vois comme c'est propre.
— Oui ; j'espère que je vais bien dormir.
Mais elle ne partait toujours pas. Il se souleva pénible- ment du fauteuil, porta la main aux premiers boutons de son gilet, en hasardant :
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