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Page:NRF 11.djvu/32

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26 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

le " lumbago " fait souflfrir, ricane et répond hargneux :

— Si je vais mieux ?... Ah ! ah ! ah ! vous en seriez bien fâché !

Julius s'étonne et prie son beau-frère de lui apprendre ce qui lui vaut le prêt d'aussi peu charitables sentiments.

— Parbleu ! vous aussi vous savez appeler le médecin sitôt qu'un des vôtres est malade ; mais, quand votre malade guérit, la médecine n'y est plus pour rien : c'est à cause des prières que vous avez faites, pendant que le médecin vous soignait. Celui-là qui n'a point fait ses pâques, parbleu ! vous trouveriez bien impertinent qu'il guérît.

— Plutôt que de prier, vous préférez rester malade ? dit d'un ton pénétré Marguerite.

De quoi vient-elle se mêler ? D'ordinaire elle ne prend jamais part aux conversations d'intérêt général et fait la supprimée dès que Julius ouvre la bouche. C'est entre hommes qu'ils causent ; foin des ménagements ! Il se tourne abruptement vers elle :

— Ma charmante, sachez que si la guérison était là, là, vous m'entendez bien, et il désigne éperdûment la salière, — tout près, mais que je dusse, pour avoir le droit de m'en saisir, implorer Monsieur le Principal (c'est ainsi qu'il s'amuse, dans ses jours d'humeur, à appeler l'Etre Suprême) ou le prier d'intervenir, de renverser pour moi l'ordre établi, l'ordre naturel des effets et des causes, l'ordre vénérable, eh bien ! je n'en voudrais pas, de sa guérison ; je lui dirais, au Principal : Fichez-moi la paix avec votre miracle : je n'en veux pas.

Il scande les mots, les syllabes ; il a haussé la voix au diapason de sa colère ^ il est affreux.

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