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Page:NRF 11.djvu/664

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658 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

fîgurez-vous qu'on vient d'assassiner mon beau-frère !

Lafcadio. — Quoi ! le petit vieux du w^agon, c'est...

Julius. — C'était Amédée Fleurissoire, à qui j'avais prêté mon billet, que je venais de mettre dans le train. Une heure auparavant il avait pris six mille francs à ma banque, et, comme il les portait sur lui, il ne me quittait pas sans regrets ; il nourrissait des idées grises, des idées noires, que sais-je ? des pressentiments. Or, dans le train... Mais vous avez lu le journal.

Lafcadio. — Le titre simplement du " fait-divers ".

Julius. — Ecoutez, que je vous le lise. (Il déploya le Carrière devant lui.) Je traduis :

La police qui faisait d* actives recherches le long de la voie ferrée^ entre Rome et NapleSy a découvert cet apr}s-midi^ dans le lit à sec du Volturne^ a cinq kiloniètres de Capoue^ le corps de la victime à laquelle appartenait sans doute la veste retrouvée hier soir dans un wagon, C^est un homme d'appa- rence modeste^ d'une cinquantaine d'années environ. (Il parais- sait plus âgé qu'il n'était.) On n'a trouvé sur lui aucun papier qui permette d'établir son identité. (Cela me donne heureusement le temps de respirer.) // a apparemment été projeté du wagon^ assez violemment pour passer par dessus le parapet du ponty en réparation à cet endroit et remplacé simplement par des poutres. (Quel style !) Le pont est élevé à plus de quinze mètres au-dessus de la rivière ; la mort a dû suivre la chute, car le corps ne porte pas la trace de blessures. Il est en bras de chemise ; au poignet droit, une manchette, semblable à celle que Von a retrouvée dans le wagon, mais à laquelle le bouton manque... (Qu'avez-vous ? — Julius s'arrêta: Lafcadio n'avait pu réprimer un sursaut, car l'idée traversa son esprit que le bouton avait été enlevé depuis le crime.

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