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Page:NRF 11.djvu/719

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RÉFLEXIONS SUR LA LITTERATURE 7I3

d'intérêt qu'en tant qu'œuvre d'art. " Fût-elle dédaignée, la moindre église rurale enrichit la vie locale et constitue, pour ceux-là mêmes qui la regardent du dehors, une valeur spiri- tuelle. " Mais si cette église est sans fidèles, que devient cette valeur spirituelle, distincte de sa valeur esthétique, et par quel paradoxe ceux qui la regardent du dehors, ceux qui ne sont • pas les vw^e lapides employées à sa construction, peuvent-ils arriver à la maintenir ?

Essayant de serrer de plus près la question, je dirais que le grand danger qui subsiste encore, à l'intérieur des sentiments de M. Barrés, contre les églises, c'est que, pour lui comme pour les adversaires qu'il combat, les églises constituent d'abord des objets de propriété humaine, et ensuite (qu'on me passe le mot) des objets de consommation : tels sont les deux visages de leur grande pitié. \

Des objets de propriété humaine. J'ai été très frappé d'ap- prendre, en lisant le livre de M. Barrés, qu'après la Séparation, la Cour de Cassation eut à se demander à qui appartenaient les églises sous l'ancien régime, et qu'on dut répondre, sans doute avec quelque embarras et quelque surprise : A Personne 1 Et M. Barrés conclut : " Il résultait de là non pas une pro- priété d'Etat, non pas une propriété communale, mais une chose publique, commune à tous, hors du commerce, affectée à perpétuité au culte divin. Les églises, dans l'ancien droit, ce sont des choses sacrées, la propriété de ceux qui sont morts et de ceux qui naîtront, un domaine spirituel, le domaine de Dieu. " Le domaine de Dieu, c'est, historiquement, très juste. Mais Dieu, pour M. Barrés, c'est la continuité humaine ; pour la Cour de Cassation, interprète le plus haut de la loi, et pour toute la loi. Dieu porte bien le nom que Polyphème croit le nom d'Ulysse. Il s'appelle Personne. La loi française n'a, comme le cyclope, qu'un œil, l'œil matériel. Elle ignore le spirituel. Ce qui est " hors du commerce " est hors la loi, et la formule de la loi de 1902 sur les droits "qui ne sont pas dans le

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