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77^ LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pas à dormir et pense à Miss May avec admiration, tout en n'ayant aucun désir de l'imiter.

De Sedgewick je retourne à Calgary. La chaleur est si forte que les pieds sont cuits à travers les semelles sur les pavés brûlants. Fait la connaissance de plusieurs femmes dactylographes, institutrices, couturières ; quelques unes font du colportage, d'autres sont agents pour des ventes de terrains. Certaines réussissent très bien. Cependant je me rends compte que les brochures répandues en Europe, encourageant l'émigration au Canada, sont d'un opti- misme un peu exagéré, cachant de parti-pris toutes les difficultés avec lesquelles le nouvel arrivé est aux prises.

    • L'Ouest n'est pas un endroit pour une femme

blanche, " me disait une jeune Anglaise, très énergique cependant, qui, arrivée au Canada comme jardinière, trompée par son associée, avait ensuite ouvert un tea room, fiasco complet, et fini par trouver une place de groom. Mais on exigeait d'elle un travail si dur qu'elle étail tombée malade et avait dû retourner en Angleterre Celles qui viennent au Canada sans posséder un méti< bien défini, les intellectuelles, les artistes, trouvent diffi| cilement à s'employer. En revanche une cuisinière oi une couturière est sûre d'un bon accueil et d'un travail bien rétribué.

Je m'étais toujours figuré l'Ouest canadien comme étant très sauvage. Il n'est pas sauvage, mais rude, et cette " civilisation barbare " n'est pas sympathique. On s'y sent à la fois repoussé et attiré ; repoussé par la rudesse des gens, attiré par leur jeunesse, leur énergie. On perd vite la notion de l'impossible dans ce pays où se voient tant de miracles. Si la vie du moment est difficile, on a

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