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RIMBAUD 45

n'était qu'en attendant, que comme substitut. Ou plutôt tout cela n'était que la plus stricte réalité ; rien de poé- tique, c'est-à-dire de créé, dans toutes ces images ; voici qu'elles se confondent tout à coup avec ce paradis enfin contemplé face à face : " J'ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels. Eh bien ! je dois enterrer mon imagination et mes souvenirs ! Une belle gloire d'artiste et de conteur emportée ! " ^ Il ne reste plus qu'une chose à faire : vivre, suivre le même chemin que tout le monde, mener son devoir jusqu'au bout, passer dans le travail ce temps encore qu'il y a jusqu'à mourir : " Moi ! moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! " ^

D'ailleurs la certitude de la vision que Rimbaud contemple suffit maintenant à apaiser le martyre qu'il souffrait ici-bas. Puisqu'il sait que son innocence trouvera sans faute un jour le climat dont elle a besoin, il cesse de sentir la violence qui lui est faite en ce monde : " Les grincements de dents, les sifflements de feu, les soupirs empestés se modèrent. Tous les souvenirs immondes s'effacent. " ^ Dès maintenant, après le terrible " combat spirituel " ^, il est en communication directe avec son bonheur futur et le souffle déjà en parvient par instants jusqu'à lui : " Cependant, c'est la veille. Recevons tous les influx de vigueur et de tendresse réelle. Et, à l'aurore, armés d'une ardente patience, nous entrerons aux splen-

  • Une Saison en enfer : A dieu ^ p. 307.

' Ibidem, p. 307.

' Ibidem, p, 308.

  • Ibidem, p. 308.

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