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280 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

de Darwin, celle- de Taine, celle de Quinton, celle de Barrés... La grandeur de Dostoïewsky vient de ce qu'il n'a jamais réduit le monde à une théorie, de ce qu'il ne s'est jamais laissé réduire par une théorie. Balzac a toujours cherché une théorie des passions ; c'est une grande chance pour lui qu'il ne l'ait jamais trouvée.

Les plus importantes découvertes ne sont dues le plus souvent qu'à la prise en considération de tout petits phénomènes, dont on ne s'apercevait jus- qu'alors que parce qu'ils faussaient légèrement les calculs, estropiaient presque insensiblement les prévisions, inclinaient imperceptiblement de-ci de-là le fléau de la balance.

Je songe à la découverte de ces nouveaux « corps simples » en chimie, d'isolation si difficile. Je songe surtout à la décomposition des corps simples, des « corps » que la chimie considérait comme « simples » jusqu'aujourd'hui. Je songe qu'en psychologie il n'y a pas de sentiments simples et que bien des découvertes dans le cœur de l'homme restent à faire.

Je redis de La Rochefoucauld ce que Saint-Evremond disait de Plutarque : «... Je pense qu'il pouvait aller plus avant et pénétrer davantage dans le fonds du naturel. Il y a des repHs et des détours en notre âme qui lui sont échappés... S'il eût défini Catihna, il nous l'eût donné avare ou prodigue : cet alieni appetens, sui profusus, était au-dessUs de sa connaissance, et il n'eût jamais démêlé ces contrariétés que Salluste a si bien séparées, et que Montagne lui-même a beaucoup mieux entendues. »

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