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LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Je ne veux pas forcer ce vers de Corneille, Je ne veux pas en forcer le sens. Ce n’est pas une proposition théologique. Il y a beaucoup de propositions de théologie dans Polyeucte, toutes d’un énoncé et d’une proposition impeccables. Ce vers n’en est pas une. Il est sensiblement autre chose ; et qui demande une particulière attention. Il est une proposition de l’histoire ou plutôt de la chronique de la grâce. Il est une proposition de monument, de reconnaissance, une proposition monumentaire et monumentale de ce qui arrive, de ce qui se produit dans la réalité de l’usage de la grâce. Je veux dire doublement de l’usage que nous en faisons, de l’usage que nous faisons d’elle et surtout de l’usage qu’elle fait de nous. Pour moi je trouve ces propositions monumentaires, ces propositions de reconnaissance de ce qui se passe dans la réalité infiniment plus pertinentes qu’une proposition théorique pure. Une telle proposition d’histoire et de monument, de reconnaissance, une telle proposition de réalité ramassée, de réalité arrivée est à une proposition théorique pure ce qu’une campagne de Napoléon est à un cours de l’École de guerre.

Mais remontons au texte. Une fois là, remontons le texte, cette pleine veine poétique, tragique, théologique. Nous allons voir combien elle abonde dans notre sens.


Seigneur, de vos bontés il faut que je l’obtienne ;
Elle a trop de vertus pour n’être pas chrétienne.
Avec trop de mérite il vous plut la former,
Pour ne vous pas connaître et ne vous pas aimer,
Pour vivre des enfers esclave infortunée,
Et sous leur triste joug mourir comme elle est née.